pühapäev, jaanuar 29, 2012

Hong-Kong Epic

Apure ne comprend toujours pas ce qui lui est arrivé cette nuit. il semble que, chargé d'un sac à dos et d'un carton de livres, et de retour du Sud avec un compagnon un peu escroc, il se soit égaré dans la gare parce que l'escroc cherchait à vider une machine à sous pour se payer le billet. Apure, tancé par les agents de sécurité, a fini par oublier son carton, ce dont il ne s'est rendu compte que bien plus tard, alors qu'il se rendait chez un ancien éditeur, au-dessus de la gare. Peu à peu Paris s'est transformé en Hong-Kong, de cela il est sûr. Chez l'éditeur, il a retrouvé nombre d'amis qui voulaient bien l'aider à récupérer son fameux carton avant que la police ne le détruise, craignant qu'il ne s'agisse d'une bombe. Apure, souffrant des jambes, avait enlevé ses chaussures et ses chaussettes, errait pieds nus dans la colline qui surplombait la gare — colline sur laquelle vivait l'éditeur, visiblement converti à l'hindouisme car le voilà qui se peint le corps de bleu et sourit tranquillement au monde. Apure redescend à la gare avec les amis, qu'il ne tarde pas à perdre de vue. Il rencontre deux curieuses enfants, toutes vêtues de rouge et coiffées de peaux de bête, en compagnie de leur père, un mendiant aux dents pourries. Il ne peut rien leur donner, se rend compte qu'il mastique (sensation familière) un énorme chewing-gum dont il se débarrasse en plusieurs temps à l'entrée de la gare. Là encore, ne prendra-t-on pas ces masses informes, orange, pour du plastic ? S'approchant du guichet de la police, Apure tâche d'expliquer son affaire. Il s'est trompé d'endroit : on est aux douanes. Dans une vitrine, des modèles de nez, de bouches, d'yeux, en cuir blanchi, semble-t-il, pour reconstituer en vraie grandeur les visages des contrebandiers. Apure ressort de la gare. Le carton est perdu, c'est certain. La ville, au soleil couchant, est d'une beauté inégalée. Paris, Hong-Kong ? Peu importe, se dit Apure, vaguement conscient d'être en train d'inventer tout cela, plutôt que de le rêver. "Un dieu !" s'écrie un passant, et s'éloigne en courant un superbe Chinois en costume ancien, la plume de paon fichée dans le casque. Apure sait que cet homme-dieu va faire surgir de la baie de Hong-Kong une nouvelle colline, un paradis sur terre. Il croise quelques-uns de ses compagnons, bredouilles, devant la gare. Voit passer, valises à la main, un couple d'amis, les rejoint. "Où allez-vous ainsi ? — À l'hôpital, l'enfant arrive", répond le mari, les larmes aux yeux. Apure, ému de même, retente sa chance à la gare. Un escalier le conduit dans de curieuses entrailles : une petite salle de bain en plastique, posée dans un atelier ferroviaire souterrain, immense, plongé dans une ombre qui pourrait être menaçante. Mais Apure, enfermé dans la salle de bain, écoute des conversations venues d'il ne sait où (la femme des toilettes et une autre personne, sans doute), et se sent, tout nu qu'il est, en sécurité.

laupäev, jaanuar 07, 2012

Un zoo

C'est un zoo d'animaux miniature, en pâte à modeler, semble-t-il, ce qui ne les empêche nullement d'être vivants et affamés. La plupart sont curieusement accouplés : une sirène sur le tigre, un lapin sur l'éléphant. Apure les appâte d'une saucisse très molle : ils se ruent sur la chair et la sucent, la tètent jusqu'à mordiller les doigts d'Apure. Les rougeurs malsaines de leurs bouches disparaissent. Il y a parmi eux deux animaux d'aspect plus ordinaire, qui se nourrissent également.

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