teisipäev, oktoober 29, 2013

Dans la nuit

Apure est au bord d'un fleuve très large ou d'un bras de mer, à la nuit tombée. L'eau est grise et presque lumineuse. Des habitants du rivage ont construit un bassin, limité par des pneus, à l'intérieur duquel des gamins se baignent. Apure, comme toujours en quête d'un cliché, sort son téléphone et commence à prendre des photos. Des jeunes gens accostent près de lui en barque ; au second débarquement, gêné, Apure fait semblant de se servir du téléphone pour un appel. Puis arrive un petit groupe d'adultes, dont un homme qui tient un grand couteau de boucher, et une femme en tailleur pantalon qui ferme la grille d'accès à la plage improvisée. Tandis que l'homme au couteau s'approche, Apure demande à la femme quels sont les horaires. "On ferme toujours à neuf heures", dit-elle. Dès qu'elle a le dos tourné, l'homme s'adresse poliment à Apure. "Il va falloir que vous me donniez votre téléphone." Apure blêmit, même s'il s'attendait à ce vol, punition de sa vanité. "Impossible, j'y ai tout mon travail." Ils discutent en marchant, l'homme brandissant son couteau et Apure protestant. L'altercation est publique. Apure se force sans mal à pleurer et lorsque l'homme parle de la pauvreté du village et de la nécessité de devoir gagner sa vie, Apure lui rétorque qu'il a, lui, perdu sa mère à trois ans (un vil mensonge) et qu'il n'y a pas de plus grande misère.

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